Colloque Interdisciplinaire « LES FRONTIÈRES »
Yurtta harp, cihanda harp »
(Guerre dans la patrie, guerre dans le monde)
La célèbre citation de Carl Von Clausewitz, l’officier prussien qui a ferraillé contre Napoléon au début du XIXe siècle, m’a toujours semblé une erreur, un prétexte inventé de toutes pièces, pour justifier une situation de conflit physique alors qu’il existe une autre option, même si celle-ci ne peut être appelée « la paix » si facilement. La guerre n’est pas la continuation de la politique par d’autres moyens. La guerre est le contraire de la politique, le contraire de la gestion des affaires de la cité. Tout au plus peut-elle être considérée comme un outil qui légitimerait l’absence de politique.
Depuis les élections du 7 juin 2015, où – en l’absence relative de conflit physique en Turquie – la politique a pu regagner ses lettres de noblesse et provoquer un effritement logique du pouvoir de Recep Tayyip Erdoğan, ce dernier a bien appris sa leçon. Lui qui espérait vivre, à travers ce nouveau mandat, sa période de Usta (maître), à l’issue de celles d’apprenti et de compagnon, considère désormais qu’il doit mener une guerre à l’intérieur comme à l’extérieur. Et constate, avec une délectation mélangée à de la paranoïa, que la guerre continue lui garantit des pouvoirs absolus que la paix (ou du moins l’absence de guerre) ne lui garantissait pas.
Cette guerre est tridimensionnelle.